jeudi 29 novembre 2018

Kativou


Kativou est un village se situant à 190 km de Kpalimé, notre base.

DM-échange et mission soutient financièrement son CMS  (centre de santé) depuis quelques années.
Aujourd'hui, muni d'un chauffeur prénommé Innocent, et de l'électricien Yao, je pars diagnostiquer l'installation solaire.

Avec Innocent, rient ne peut t'arriver.

La route est longue.


Dans toute la région de Kativou, aucune panne du réseau électrique n’a jamais été observée ! Pour cause…Il n’y a pas d’électricité du tout !
Seuls, quelques villageois peuvent s'acheter un panneau solaire et une batterie.

C'est un peu l'aventure. Je suis tout enjoué de m'absenter et de m'éloigner deux jours de la famille. Le papa poule ce n’est pas trop mon truc !!

Baobab avec ses "pains de singe" qui pendent.


Pourquoi prendre un chauffeur ?
Tout simplement parce qu'il connaît la route, connaît la culture, sait que faire si notre pare-choc se mange une chèvre, peut négocier dans les différents contrôles situés sur la route.

Il faut toujours être en bon terme avec son chauffeur ! Il n'est pas « Innocent » 😉
Il sait tout, a beaucoup voyagé dans le pays, a côtoyé du monde.Dans les longs moments d'attente, il en profite pour discuter avec les locaux et glaner une multitude d'informations.

Seul un bout de route connait le goudron, le reste étant la piste.
Il fait chaud, la clim' ne fonctionne pas, mais l'ambiance est bonne.
Il nous faudra 5 heures de piste/route/piste pour y arriver.
Nous traversons beaucoup de villages qui me paraissent tous très pauvres.


Un village sur la route

Voyage au rythme du troupeau


Sur place, nous sommes accueillis par Alain, le responsable du centre et Eli, le comptable.
Avec Yao, nous nous apercevons assez vite que l’installation photovoltaïque a quelques soucis.
L’installation manque d’autonomie, les batteries gonflent et un panneau est cassé.

Il faudra réfléchir à tout cela et se poser la question du « pourquoi? ».

Installation solaire de Kativou

Je profite de ma venue pour récolter quelques informations sur le futur dépotoir prévu non loin de là.
Mais rien n’est envisageable avant de saluer le chef du village dans sa maison.
C'est impressionnant! Les gestes sont très lents: on s'assoit doucement, on se salue en se courbant, ça parle éwé, il y a beaucoup de respect, beaucoup de coutumes, et je me sens ...paumé!

Toute cette culture, toute cette histoire africaine et moi…qui débarque sans rien comprendre ! 

Les villageois sont curieux

Champs de coton au bord de la route

Au Togo, beaucoup de personnes mangent une fois par jour. Aujourd’hui, nous les imitons 😉
Avec mes collègues nous avons grignoté des bananes sur la route, mais à 18h ….. Fait faim !
Innocent nous trouve du egblin (sorte de pâte de maïs cuite, enrobée dans des feuilles de manioc).
Il achète des tomates, piment, sardines au bord de la route. Il trouve une femme dans le centre de santé, qui pourra nous préparer cette sauce, à manger crue.
Désolé pour le sexisme, mais ici, c’est comme ça !
Je ne suis pas trop fragile, mais la nourriture crue…je ne peux pas m’y risquer.
Heureusement que Georgette m’a concocté un plan B.

Pour dormir à Kativou, il ne faut pas être exigeant. Difficile de trouver un bout de savon afin de se laver les mains! 
Je dois aussi installer ma moustiquaire. Au Togo, la moitié des décès des enfants de moins de 5 ans est dûe au paludisme. En me protégeant, j'évite la prolifération de cette maladie. 

Les petites bêtes ne mangent pas les grosses ! Mon œil !

Mon lit à Kativou: pas assez d’électricité pour le ventilateur.


Pendant la soirée, loin des regards et de la hiérarchie, mes collègues se lâchent un peu. Nous parlons politique, colonisation, élections, et là…. Ça fait mal !

Ce voyage ne fut pas de tout repos. Mais en même temps, un grand bol d’oxygène !


Pour radio Togo, Antoine

jeudi 22 novembre 2018

Notre travail


Enfin nous allons pouvoir vous parler de notre travail !Ce n'est évidemment pas un secret, mais il y a eu quelques vagues et nous tenions à rester discrets avant que la mer ne se calme.

La mer était agitée, mais notre employeur, "DM-échange et mission", nous a envoyé, depuis la Suisse, un marin de haute mer.

Durant 3 jours, nous avons pu exposer nos craintes et posé nos limites.Nous avons été écoutés, nous avons discuté, trouvé des compromis et c'est ensemble que nous avons pu tenir le gouvernail de cette barque folle ! 

Aujourd'hui, voilà notre travail :

L'EEPT (église évangélique presbytérienne du Togo) est propriétaire d'un hôpital ainsi que de quatre centres de santé au Togo. 

Tu vas peut-être me demander "Pourquoi l'église ?"Bon....Cela fera peut-être partie d'un autre sujet de ce blog... ok ?

L'EEPT, donc l'église, a développé un programme sanitaire qui est soutenu par l'ONG "DM échange émission", que nous représentons.Dans les faits, nous devons visiter, étudier et comprendre les besoins de l' hôpital ainsi que des quatre centres de santé, afin de déterminer leurs besoins en formation. 

Ensuite nous organisons de A à Z toutes ces formations, qui auront lieu sur 3 jours et se dérouleront tous les 2 mois à Kpalimé. L'Espace de formation ne se fera pas à l'hôpital, comme initialement prévu.





Le centre de formation "BAFOK"



Le centre de formation "BAFOK"


La première formation/atelier, commencera en février et concernera l'aumônerie sous tous ses aspects.Le programme accueillera d'ailleurs une aumônière de Genève qui viendra au Togo. C'est sur.....il y aura des échanges !



Le "BAFOK" bien entretenu




En plus des formations, on pourra demander à Antoine d'établir un plan de maintenance et d'avoir un regard critique sur certains chantiers liés à l'hôpital ou aux centres de santé.

Ces centres de santé sont répartis dans tout le Togo. Les routes n'étant pas vraiment comme chez nous😉, un certain temps est nécessaire pour se déplacer d'un dispensaire à l'autre.
De plus, juste au passage, nous avons quand même trois enfants, qui, bien que débrouilles, ont encore besoin de nous montrer qu'ils sont bien vivants !




Le hall d'entrée



La cuisine du centre





mercredi 14 novembre 2018

Désert social


Quels sont les domaines les plus importants de la vie ?
On pourrait dire : boire, manger, un toit pour se mettre à l'abri, la santé, un travail et ensuite....
Ensuite, il y a le côté social, les liens créés avec autrui : la famille, les amis, les copains du club, …

Or, nous avons délibérément choisi de nous parachuter au milieu du Togo. Nous avons volontairement quitté nos attaches, notre travail, notre statut social. Nous avons laissé nos acquis et nos certitudes.

Et maintenant ? 

Souvent, ce qu’on égare prend soudainement tant de valeur ! Les amis sont un trésor et rien ne peut les remplacer !

Nous sommes là, au milieu de ce vaste océan, grouillant de vie. Et nous regardons de tout côté, tentant de capter un regard ! Nous nous sentons seuls. Tous, nous essayons de nager, d'apprendre. Mais notre mémoire nous freine, elle nous ramène continuellement dans notre passé, notre vie dans ce petit village Suisse.

Nous souffrons tous les 5 de ce désert social.

La différence de niveau de vie est si importante !
Comment se faire des amis quand la personne face à vous ne mange qu’une fois par jour ? Quand elle n'a pas accès à l'eau ? Qu’elle ne peut pas mettre ses enfants à l'école ? Que peut-on partager ? 

Notre maison était ouverte mais nous nous sommes laissés envahir. Aucune agressivité, aucune méchanceté. Simplement des personnes qui ont vu une opportunité dans notre arrivée. Elles ont tenté leur chance.
De notre côté, naïvement, nous pensions tisser des échanges. Et nous sommes là, devant ces parcours de vie, nous sommes devant ces femmes et ces hommes. Nous devons nous protéger, apprendre à mettre une limite et surtout perdre la naïveté de croire que l'on nous approche que par amitié.


Des barbelés sur notre mur ! Ce n'est pourtant pas le gendre de la maison.


Je me souviens de cet homme, qui, après m'avoir rendu quelques menus services, s’est imposé à 6h30 du matin pour laver ma voiture, couper mon gazon, … et par la même occasion, recharger son portable.
Ce n'est pas un petit boulot qu'il cherche, il a un autre problème. Ses enfants se sont fait chasser de l'école, car les frais d’écolage n'ont pas pu être payés. Il en a les larmes aux yeux et cherche une solution, un mécène.
Nous avons souhaité l'aider, mais nous avons dû rebrousser chemin. 

Des histoires comme celle-ci, nous en avons à foison.

Pour les enfants, c’est également difficile. Leurs copains ou copines d’école s’expriment plutôt en éwé (leur langue maternelle). Ils n’ont jamais vu de légo ou d’autres jouets de construction. La slackline, toujours tendue dans notre jardin, attire beaucoup.



Sommes nous trop riche, pour que la porte doive rester fermée ?


Je commence à comprendre pourquoi on reste souvent dans les mêmes couches sociales et qu'il y a très peu d'échanges avec les autres niveaux de vie, même chez nous.

Je suis un homme blanc, donc riche, parmi des hommes noirs plus pauvres.
C'est écrit sur mon front et je ne peux pas l’effacer.

Pour avoir des amis, il nous faut absolument trouver des personnes qui ont assouvi leurs besoins primaires : boire, manger, un toit, la santé et les enfants à l'école.

Probablement, quand notre projet sera mieux déterminé, que nous pourrons travailler dans une direction donnée, pourrons-nous rencontrer ce genre de personne et pourquoi pas, avoir quelques amis togolais ?



3 jours de pause avec un peu de tristesse …… et vous savez quoi ??



Enfin, nous allons pouvoir parler de notre travail, il vient de prendre une nouvelle orientation. Nous sommes soulagés.
Après la pluie, le soleil !
Vive la Vie !!

Rendez-vous à jeudi prochain 😉

Gros becs les Z’AMIS !

jeudi 8 novembre 2018

Découverte du barrage



Je ne comprends plus rien !


L'hôpital Béthesda a d'énormes problèmes d'eau. Souvent, il en est privé. Alors, plus rien n'est possible.

Comment nettoyer, se laver les mains, désinfecter le matériel, opérer? Comment vivre ?


Pourtant, les architectes allemands avaient bien réfléchi, me semble-t-il. Ils ont construit un hôpital au pied de la plus haute montagne du Togo, dans une végétation luxuriante! De leur temps, pas de problèmes hydriques: au-dessus du bâtiment, ils ont conçu des barrages!
Je ne suis pas spécialiste, mais Clotilde me fait remarquer que l'eau est là. Elle coule à flot, ... dans le caniveau.



Alors, comment se fait-il que l'hôpital ait dû creuser des forages? Extraire en sous-sol, l'eau de la nappe phréatique, nécessite l'installation de pompes, gourmandes en énergie électrique.
Comment se fait-il que Yao court dans tous les sens afin de réparer ces pompes, usées les unes après les autres, alors que l'eau est au-dessus de nos têtes?

C'est que l'eau n'est pas potable, me dit-on sans répit ! 
Mais les villageois boivent l'eau des barrages? Et ils ne sont pas malades?
Il faut en avoir le cœur net. Ces barrages sont à 1h de marche, nous dit-on.


Un beau matin, nous quittons donc la maison dans le but de découvrir ces barrages, dont tous parlent. En prévision de la route, je fais regonfler les pneus de notre voiture.
Et nous partons avec Tchaa, technicien supérieur en génie sanitaire, ainsi qu’un guide trouvé sur place.





Clotilde rentre dans la brousse


La végétation est incroyable, c'est presque la forêt vierge. Pourtant, au milieu de nul part,nous voici nez-à-nez avec des plantations de bananiers, cacaotiers, du manioc. Au loin, le vacarme des tronçonneuses. Les bûcherons débitent les planches directement sur place.





Un cacaotier



Planches débitées sur place


20 minutes de marche et nous voilà fixés. Nous qui pensions voir le barrage de La Grande Dixence! Nous sommes juste face à une petite retenue d'eau alimentée par un ruisseau !!
Tous les animaux peuvent venir boire, nager, se noyer et pourquoi pas distribuer quelques parasites.


Le barrage de la petite Dixence 


Nous sommes déjà bien transpirants quand notre guide nous demande :
"Voulez-vous vraiment monter plus haut pour voir les deux autres barrages ?"
Et là, Clotilde répond du tac-au-tac :
« Bien sûr, puisque nous sommes là ! »
La boulette !!  Je savais qu'elle devait fermer sa grande bouche de grenouille ;-)
Vous devinez la suite:grosse transpirée, mais la balade était splendide.


Monsieur Tchaa




Sans me vanter, je n'ai pas peur de dire que les chemins de montagne, je connais. Mais lorsque nous croisons trois femmes, tongs au pied, courant littéralement sur ce sentier, je reste perplexe !
Elles n'ont pas droit à un seul faux pas. Pourtant, d'énormes charges de bananes en équilibre sur la tête, elles ne peuvent regarder où elles mettent leurs pieds.
Elles volent, c'est tout !

De même que le premier, les 2 barrages construits plus haut dans la montagne, sont de simples retenues. Alors, nous comprenons pourquoi l'hôpital a eu l’obligation de faire des forages. Le but était-il d'éviter tout accident sanitaire?
Quand à la qualité de l’eau, on n’en sait rien, mais en sécurisant le site et en faisant des aménagement….


Barrage




Retour à la voiture. Et comme ici, rien n'est simple, on s'attaque à une crevaison !
Pas de problème, nous sommes suisses et organisés !
Quand je remarque donc que la clé pour démonter la roue n'est pas la bonne... Je me marre. J'ai anticipé et je sors ma caisse à outils.
« T'as vu chérie? Je suis équipé ! »
Tout le monde est épaté en voyant mes outils flambant neufs. Et moi, je bombe le torse...


 Le grand mécanicien 


Mais comment ajuster cette roue de secours? 
"A 3 hommes, vous allez quand même vous en sortir, oui?"
Hé bien non! Cette gente ne s'adapte pas à cette 😡 bagnole ! Après toute cette marche, dans la chaleur, bien fatigué, le guide charge le pneu sur son épaule : direction le mécano du village.
Tout cela pour m'entendre dire qu'il n'y a pas de crevaison. Le problème venait simplement de la valve.
Elle a mal été resserrée lors du regonflage des pneus du matin !
Pfffff !